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La trêve des combats est censée permettre aux pourparlers de paix de reprendre à Genève sous l’égide de l’ONU. Programmé pour ce jeudi, le nouveau cycle de négociations ne devrait finalement débuter que lundi 14 mars. Évoquant une « lueur d’espoir » cinq ans après le début de la guerre civile, le président syrien Bachar al-Assad a promis de respecter la trêve, et le gouvernement syrien sera représenté à la table des négociations. Le Haut Comité des négociations (HCN), qui représente l’opposition, a jugé en revanche qu’aucune discussion sérieuse ne pourra avoir lieu tant que les clauses humanitaires de la résolution 2254 des Nations unies ne seront pas respectées, et notamment l’article 12 de ce texte, qui détaille l’acheminement de l’aide humanitaire dans les zones assiégées. Le président du HCN, Riad Hijab, a par ailleurs affirmé que les forces gouvernementales et l’aviation russe avaient « massacré » des dizaines de civils lors d’une attaque lundi dans le gouvernorat d’Idlib, au nord-ouest du pays. Riad Hijab a ajouté au cours d’une conférence de presse que ces violences, en violation de l’accord de cessation des hostilités, conduisaient l’opposition à s’interroger sur l’opportunité de participer au nouveau cycle de discussions à Genève. Selon lui, une décision sera prise avant la fin de la semaine.Syrie: l’offensive de Damas contre les hôpitaux soutenus par MSF Par René Backmann
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Présence de l’opposition ou non aux négociations, les données du conflit ne sont toutefois plus les mêmes que l’an passé, tant les six derniers mois ont largement modifié l’approche des pays étrangers impliqués dans la guerre civile syrienne. Malgré toutes les exactions commises par le régime et la permanence des manifestations contre Bachar al-Assad, le sort du président syrien est aujourd’hui passé au second plan. Le temps de ce nouveau « round » de négociations est celui de l’alignement des intérêts géopolitiques. D’une divergence de fond autour du sort du régime syrien, les pays occidentaux comme la Russie et l’Iran ont convergé désormais vers une priorité : la lutte contre les djihadistes.
Et de fait, les djihadistes de l’État islamique reculent en Syrie. Leur régression est toutefois moins le fait des bombardements russes que des combattants du PYD kurde, qui bénéficient de l’appui aérien américain et ne sont désormais plus qu’à 25 kilomètres de la capitale du « Califat » de l’EI, Raqqa. Depuis le mois de juin de 2015 et la reprise de la ville de Tal Abiad (nord de la Syrie) par les troupes kurdes, l’EI semble avoir changé de tactique et se retire plus vite des combats sur son front ouest, pour mieux conserver son potentiel militaire et pratiquer des attaques rapides et ciblées. Une tactique de harcèlement plutôt que d’occupation du territoire qui pourrait aussi avoir comme objectif d’impliquer davantage la Turquie sur le terrain syrien, Ankara craignant plus que tout l’émergence d’un Kurdistan autonome à sa frontière. Ces deux derniers mois, l’EI a par ailleurs progressé au sein de la ville de Deir ez-Zor, n’a pas perdu de position essentielle sur le front d’Alep et s’est maintenu sur le front de Palmyre, où l’aviation russe bombarde pourtant ses positions.
C’est finalement en Irak que l’organisation d’al-Baghdadi a subi le plus de pertes, avec notamment la chute de Ramadi, rasée par l’aviation américaine et de nouveau tenue par l’armée irakienne. L’EI peut-il perdre maintenant Mossoul, dont la chute spectaculaire à l’été 2014 avait provoqué l’émoi de la communauté internationale ? « La question est plutôt : la coalition anti-EI est-elle prête à raser une ville de 3 millions d’habitants ? affirme Romain Caillet, consultant et spécialiste des formations djihadistes. La reconquête de l’Irak par la coalition passe par une tactique simple : bombarder les positions de l’État islamique, détruire les villes, et occuper ce qu’il en reste grâce aux troupes de l’armée irakienne. C’est comme cela que la coalition procède. »
En Irak comme en Syrie, l’État islamique est devenu l’ennemi à frapper en priorité. Et c’est désormais la rhétorique antiterroriste russo-iranienne qui prévaut sur toute autre considération diplomatique.
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